Pèlerinage 80e anniversaire des combats en Italie : Sur les traces de la 1re DFL
Le pèlerinage mémoriel de la 1re Division Française Libre, sous l’égide de la Fondation de la France Libre, quitta la France, jeudi 16 mai aux aurores.
Composé de 11 pèlerins, départ d’Orly, nous retrouvâmes à l’aéroport de Rome la famille de Villeneuve, puis Antonio Ciminna, vice-président de l’amicale nationale des fusiliers-marins commandos accompagné de sa femme et sa fille ainsi que son porte drapeau Francis, puis Monsieur Souleau nous rejoignit au cours du séjour.
Un dossier fut distribué à chacun, incluant : 2 cartes (du Garigliano et de la région de Montefiascone) ; Un récit succinct de la campagne d’Italie ; 3 pages « avant et après Tivoli » ; Plusieurs descriptions des moments forts des combats ; Sessa Aurunca ; l’histoire des cimetières militaires français en Italie ; Une description des combats vue par un fusiliers-marin.
Dès l’arrivée à Rome, nous fûmes pris en charge par Voyageurs du Monde et immédiatement direction « Abbaye de Monte Cassino ». Visite guidée où nous eûmes accès à la crypte, préservée des bombardements puis la basilique totalement reconstruite, seul l’arrière de l’autel échappa à la bombe qui n’explosa pas. Lieu imposant et magnifiquement orné de marbre.
Puis direction Sessa Aurunca où, à trois reprises, nous essayons de franchir le Garigliano, faute de pont en bon état : le symbole de la difficulté était clair, nous avons pu percevoir un clin d’œil aux difficultés de nos anciens à franchir ce lieu. Sessa Aurunca, malheureusement légèrement dans le brouillard, nous découvrîmes le Château Ducal, dressé à 7 km du Garigliano, où fut installé le PC du Corps expéditionnaire français d’où le général Juin et ses commandants de division purent embrasser d’un seul coup d’œil tout le terrain de la prochaine offensive sur la ligne Gustav. Celle-ci barre l’entrée de la vallée du Liri en s’appuyant sur les deux énormes bastions que constituent le Monte Cassino au Nord et le monte Majo au Sud. Arrivée à notre hôtel à Castrocielo vers 20 heures, près de Pontecorvo.
Vendredi 17 mai, 11 heures, cérémonie officielle du 80e anniversaire de la bataille du Garigliano, à Venafro, en présence de Madame la Secrétaire d’État Patricia Miralles, sous la présidence de monsieur l’ambassadeur de France en Italie, Martin Briens. Étaient présents : le 1er régiment de tirailleurs d’Épinal, 78 militaires ; le Colonel Michelin commandant l’unité, commandant des troupes ; le drapeau du 1er régiment de tirailleurs et sa garde ; 2e section du 1/3/18 et la musique du 1er Tirailleurs (Nouba). Cérémonie émouvante, sous un soleil radieux, où les pèlerins de la 1re DFL faisaient partie intégrante de la cérémonie, à gauche du monument. Le dépôt de gerbes de la Fondation – 1re DFL s’effectua devant le monument aux morts à l’entrée du cimetière.
Aujourd’hui, deux grands lieux de mémoire commémorent la campagne d’Italie. « Le cimetière de Monte Mario à Rome et le cimetière de Venafro. Plus de 6 577 soldats tués, et également de 23 000 blessés. Le Corps expéditionnaire français en Italie totalise 30 000 pertes, tués et blessés. C’est un chiffre énorme car les effectifs du CEF étaient de 76 000 hommes, avec un pic de 110 000 hommes lors de la bataille du Garigliano[1] » souligne l’historien Guillaume Denglos.
Puis déjeuner, où la pasta traditionnelle ouvrait chacun de nos repas. Dans l’après-midi, nous nous dirigeâmes vers Tivoli, la Villa Adriana. Après la visite nous prenons la direction de Montefiascone. Dans le car, de nombreux faits 1re DFL furent évoqués. Françoise Amiel lut des textes sur Barberot, lorsqu’il fut blessé, ses réactions, son style. Michèle Chrétien partagea des extraits de son livre, de son père, de ses recherches. Patrice Armspach essaya de relater l’histoire de la Croix de Lorraine, Germain Lemoine évoqua le BM 5, et son oncle par alliance, Compagnon de la Libération Jean Jestin. Marie Thérèse Maniscalco, devint notre Mascotte, et en tant qu’épouse de notre ancien porte drapeau, elle n’hésitait pas à s’exprimer. Neil Kearney, « notre » Américain, exprimait souvent ses réactions franco-américaines que nous accueillions très chaleureusement. Robin Cecchini, notre interprète, nous permettait d’échanger plus facilement au restaurant et lors de nos visites. Thierry de Villeneuve, spécialiste en photos militaires d’époque, nous relatait les détails historiques en lien avec les lieux que nous traversions. Nous avions trois portes drapeaux : Patrice Armspach, porte drapeau 1re DFL et Thierry de Villeneuve, portant le drapeau du Souvenir Français d’Aix en Provence, ainsi que Francis, porte drapeau des fusiliers marins – Dixmude.
Samedi 18 mai. 10 heures 30, cérémonie à Radicofani en l’honneur de la 13e DBLE en présence de Monsieur le Maire, selon le déroulement établi par Antonio Ciminna.Devant la stèle de la 13, Françoise Kearney, nièce de André Lichtwitz, présenta la 13e DBLE avec fierté, puis en l’honneur du Colonel Laurent Champrosay, je lus un extrait du discours du général de Larminat qu’il prononça lors du dévoilement d’une plaque sur la maison natale du Colonel Laurent Champrosay.Monsieur le Maire de Radicofani nous accompagna pour le dépôt de gerbe.
Nous avions organisé un repas au bord du lac de Bolsena, présidé par la Secrétaire d’État Patricia Miralles, accompagnée du commissaire Jérôme Theillier, attaché défense auprès de l’ambassade. Ce fut un moment d’échange où nos pèlerins purent converser sur mille et un sujets auprès de la Secrétaire d’État. À 15 heures 30, à Viterbo, dévoilement d’une plaque par la Secrétaire d’État, Antonio Ciminna représentant le Commandant Desgrées du Loû et moi-même, sur les lieux où d’Amyot d’Inville fut tué. La présence de madame le Maire de Viterbo, des autorités civiles et militaires locales, d’historiens qui effectuèrent le repérage nécessaire afin de déterminer le lieu exact où le capitaine de frégate Amyot d’Inville fut tué, prirent part à la cérémonie, aux hymnes nationaux italien et français
La lecture de la biographie d’Amyot d’Inville fut en italien. Compagnon de la Libération, il participa aux combats de Bir Hakeim, à la seconde bataille d’el Alamein ainsi qu’à la campagne de Tunisie. Il succéda au commandant Detroyat en 1941 et devint chef du 1er bataillon de fusiliers marins. Il n’hésita pas à transformer son bataillon en régiment de reconnaissance blindé de la 1re DFL. Une gerbe fut déposée dans ce lieu sauvage, près d’un ruisseau, sous un pont et c’est après le passage de huit véhicules, qu’Amyot d’Inville, dans un nuage de poussière et de fumée, fut tué sur le coup, à quatre mètres du Commandant Langlois. Nous nous devions de lui rendre hommage
Dimanche 19 mai, nous sommes de retour près de Pontecorvo et cette journée fut dédiée à la vallée du Liri. Nous débutons par la visite du musée à Coreno Ausonio, lieu où sont regroupés tous les objets trouvés autour du Mont Mayo sous l’égide de l’association Linea Gustav. Casques, insignes, cartes 1re DFL, uniformes ainsi que de nombreux effets allemands. Une mine d’information. Puis nous reprenons notre bus vers San Andrea, San Ambroggio, San Appolinare. Nous déjeunons à San Giorgio, déposons des drapeaux français portant l’insigne 1re DFL, autour du monument aux morts en souvenir de tous ceux qui sont morts en ce lieu tragique, un homme s’approche et nous indique qu’une stèle française est érigée en lisière de la ville. Robin Cecchini, Italien, part en repérage et à son retour décidons, après déjeuner, de la découvrir. Nous trouvons au bord de la route, un lieu fleuri, bien entretenu, muni d’une plaque indiquant que les morts de la 1re DFL sont enterrés à Naples. Nous inondons la stèle de petits drapeaux français 1re DFL en chantant tous la Marseillaise, nous sommes pris d’une vive émotion.
L’étape suivante était le « musée de la Battaglia » à Monte Leucio. Ce lieu nécessitait un bus plus petit mais nous devions retrouver des accompagnateurs en voitures, entre temps nous constatons un éboulement de la route ce qui n’encourageait pas notre chauffeur. Nous prîmes la route du Monte Leucio mais la visite du musée ne fut pas possible.
Direction Rome. Nos diners reflétaient une atmosphère très joyeuse, chacun évoquait les anciens, les faits historiques et la joie d’être ensemble. Monsieur Souleau nous a rejoint à l’hôtel. Son père est enterré au cimetière de Monte Mario, il avait 3 ans. Grenoblois il n’hésite pas nous faire part de « sa vie » en tant qu’enfant qui n’a pas connu son père. Fils d’un polytechnicien, du régiment d’artillerie, il a vécu dans l’ombre d’un héros, son père.
Lundi 20 mai. Cimetière de Monte Mario.Nous commençâmes par nous recueillir sur la tombe de Monsieur Souleau qui était entouré de ses amis du RA, à côté d’Henri Silvy, tué à Guidoni, près de Tivoli.Puis honneur au commandant Amyot d’Inville et Laurent Champrosay, côte à côte dans le cimetière, quelle belle coïncidence.Je lus leurs biographies respectives sans omettre la fameuse phrase de Laurent Champrosay : « Ceux qui veulent me suivre pour se battre n’importe où pour le bien du pays, je les mènerai, je les conduirai qu’il reste ici, les autres peuvent s’en aller ».Dépôt de gerbe de la Fondation – 1re DFL 1er RFM puis suite au souhait du 1er RAMA, une gerbe fut posée sur la tombe de Laurent Champrosay.Après lecture par Antonio Ciminna du parcours du 1er RFM. La Marseillaise a capella retentit dans ce cimetière où de nombreux anciens de la 1re DFL reposent en paix.Puis nous sommes attendus à la Villa Médicis, une guide hors pair nous fit découvrir ce haut lieux, ces vues imprenables, ces escaliers que nous montâmes et descendirent à plusieurs reprises, en fin de journée nous avions parcouru 8 km !
Le restaurant, service lent, ne fut pas des meilleurs. Mais nous devions nous hâter et c’est là que Neil nous guida dans les méandres de Rome au vu de son chapeau. Notre rendez-vous auprès de l’ambassadeur prévu à 15 heures fut légèrement décalé et c’est avec le sourire, dans la chaleur romaine, que nous arrivâmes au Palais Farnese. Monsieur l’ambassadeur de France, Martin Briens, nous accueilli autour d’une grande table, dans son bureau, où nous échangeâmes sur notre voyage mémoriel, il nous fit part de sa joie de nous voir au cimetière de Venafro. Nous avons évoqué des possibilités d’échanges de pièces de musées privés entre la France et l’Italie. Je lui remis au nom de la Fondation de la France Libre le médaillon du Général Koenig et à Antonio Ciminna, un médaillon des fusiliers marins. La photo traditionnelle fut prise et il est vrai que nos pèlerins éprouvaient une certaine difficulté à quitter ce lieu magnifique rempli d’histoire. Sortant de l’ambassade la fatigue était au rendez-vous et lorsque j’émis l’idée de marcher jusqu’à l’église Française Saint Louis, les regards parlaient et nous repriment le bus. Visite de Rome en car, le Colisée, le Vatican – de loin-, l’arc de Constantin, Saint Jean de Latran…
Mardi 21 mai, retour en France, une dernière visite commentée de la ville éternelle eu lieu dans le bus et c’est avec un peu de retard que nous atterrîmes à Orly. Notre voyage mémoriel s’acheva dans la joie d’avoir parcouru ces lieux historiques où la présence « politique » fut souvent ressentie, la 1re DFL avait vécu en pensées avec ses anciens, fière et remplie de souvenirs. Le 80e anniversaire des combats en Italie n’est que le début et nous nous retrouverons très vite, sur les traces de la 1re DFL, en Provence, en Alsace et à l’Authion.
Vive la 1re DFL.
Marie-Hélène Châtel
Déléguée à la Mémoire de la 1re DFL
[1] https://www.defense.gouv.fr/sga/actualites/campagne-ditalie-du-corps-expeditionnaire-francais-1943-1944#:~:text=Le%20corps%20exp%C3%A9ditionnaire%20fran%C3%A7ais%20en,de%20la%20bataille%20du%20Garigliano.