Colonel Marcel Levain
Le colonel Marcel Levain est décédé le 20 septembre. Simple capitaine d’infanterie Coloniale à l’époque, on peut dire qu’il fit rallier à la France Combattante les autorités de Vichy en Indochine, à commencer par le général commandant supérieur.
Saint-Cyrien à 20 ans, désigné pour le Levant en 1931, il y sert jusqu’en 1937 avant de rejoindre l’Indochine en août 1938. Affecté à Cao Bang, dans le 2e Territoire Militaire, il se passionne pour les problèmes frontaliers avec les Chinois, puis lors de l’affaire de Langson provoquée par les Japonais en 1940.
Affecté le 20 septembre 1941 au SR Inter colonial à Hanoï (BSM du Colonel Maupin, dépendant directement du ministère des Colonies), il y met sa passion du renseignement et de l’action au service de la France Libre, dans une Indochine sous la férule de Vichy et occupée par l’armée Japonaise. De sa propre initiative, il prend contact avec le général de Gaulle, à Alger, en y dépêchant le capitaine Milon.
La citation de sa croix de guerre 1939-1945, qui accompagne sa promotion dans l’ordre de la Légion d’honneur, résume son action :
« Magnifique officier, animé d’un patriotisme farouche au service duquel il met une intelligence lucide, une volonté toujours en action, un sens de l’organisation toujours remarquable. Véritable promoteur de la Résistance en Indochine, créateur du renseignement avec les Chinois et du premier service d’action clandestine en 1940, il prit en 1943, à l’insu de ses chefs, l’initiative de la première liaison avec le gouvernement de la France Combattante et détermina ainsi, par le fait accompli, les chefs de l’armée en Indochine à se rallier à la France Libre. Aux prises avec les difficultés locales réussit par son action énergique et tenace à rallier les bonnes volontés sectaires et éparses à une ligne strictement française. Après avoir organisé les liaisons de renseignement avec la Mission Militaire Française en Chine, il prit à son compte l’organisation du Service d’Action Intérieure, établissant une liaison personnelle avec Calcutta et rentrant en Indochine pour appliquer les directives discutées à l’extérieur. Modèle de modestie bien que conscient de sa valeur, il s’effaça derrière les chefs qu’il avait fait désigner, restant l’âme de la Résistance qu’il avait fait naître. »
Lors de l’attaque traîtresse japonaise du 9 mars 1945 sous le feu ennemi, il détruit les archives et le matériel de son SR : capturé, il est déporté au « Camp de la Mort-Lente » de Hoâ Binh, jusqu’au 23 août 1945. Incarcéré par les Japonais à la citadelle de Hanoï, surveillée par le Viêt-Minh, il s’en échappe pour rejoindre Sainten et sa mission et reconstitue son Service de renseignement.
Maints témoignages lui sont décernés lors de sa carrière, généralement au 2e Bureau, jusqu’à son départ de l’armée en 1960. Malgré sa modestie et un certain éloignement, l’action du colonel d’infanterie de marine Marcel Levain est reconnue par les historiens, en France comme à l’étranger.
Il disparaît au moment où, cédant à la demande de ses camarades de la Fédération des Réseaux de la Résistance FFL-FFC 1940-1945, dont il était le président d’honneur, il se préparait à dévoiler les détails de son action en Indochine, de 1940 à 1945, contre le Japon troisième puissance de l’Axe.
Chef du Réseau de Résistance Maupin-Levain, Français Libre, le colonel Marcel Levain devait être fait commandeur dans l’ordre de la Légion d’honneur. Titulaire de la croix de guerre 1939-1945 (palme), de la croix de guerre des TOE (deux palmes et une étoile en vermeil), il était médaillé de la Résistance (of), CVR et décoré d’ordres alliés.
PCC R. Poujade
Délégué de la Fédération des Réseaux de la Résistance en Indochine FFL-FFC 1939-1945
Extrait de la Revue de la France Libre, n° 268, 4e trimestre 1989.