Chant de marche des « Russes de la France Libre »

Chant de marche des « Russes de la France Libre »

Chant de marche des « Russes de la France Libre »

Le contexte

Entre juillet 1940 et juin 1941, 218 officiers, sous-officiers et soldats français capturés lors de la bataille de France de mai-juin 1940 s’évadent des camps de prisonniers en Allemagne vers l’est. Parvenus sur le territoire de l’Union soviétique, qui est allié à l’Allemagne depuis le pacte germano-soviétique du 23 août 1939, ces Français sont arrêtés, internés dans les geôles du NKVD, à la Loubianka, avant d’être expédiés au camp de Kozielsk (Mitchourine), au sud-ouest de Moscou. Durant cet internement, Louis Mitelberg, un Polonais qui étudiait aux Beaux-Arts en France avant sa mobilisation, réalise des dessins reproduisant des scènes de la vie dans les camps.

Le 22 juin 1941, l’invasion allemande de l’URSS bouleverse les alliances. Les Français sont évacués vers le camp de Grazoviets, rebaptisé par eux « Grazievitch » et occupé majoritairement par des Polonais, où ils arrivent le 2 juillet. Durant le trajet en train entre Mitchourine et Grazievitch, l’aspirant René Millet compose, sur l’air du chant de marche des bataillonnaires, le chant des évadés, qui devient leur air de ralliement. Après négociations, 186 de ces Français choisissent de rejoindre la Grande-Bretagne, où ils s’engagent dans les Forces françaises libres.

Bibliographie
Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Prisonniers de la liberté : L’odyssée des 218 évadés par l’URSS, 1940-1941, Paris, Témoins Gallimard, 2004

Le document

Air approximatif: Chant de marche-des bataillonnaires

Refrain

Pour combattre avec de Gaulle,
Souviens-toi, souviens-toi
Qu’il faut s’taper pas mal de tôles
En veux-tu, en voilà,
De Kaunas à Mitchourine,
Au paradis de Staline,
Évadés dans la misère,
Toujours la mine altière.

Quand on a franchi la frontière,
Les uns les autres on avait cru
Retrouver enfin la lumière
Et tout ce qu’on avait perdu.
Ne nous cassons pas la nénette
Si nous sommes encore internés.
Qu’est-ce ça fout ?’
On s’en fout.
Pour combattre, etc.

On voulait manger des côtelettes
Et boire un coup de beaujolais ;
On aurait aimé des fillettes :
Depuis le temps qu’on en rêvait…
Ne nous cassons pas la nénette
Si nous sommes encore internés
Qu’est-ce ça fout ?
On s’en fout.
Pour combattre, etc.

On crève d’envie d’bouffer du boche
Assaisonné de macaronis.
On voudrait casser la caboche
À Hitler et Mussolini.
Ne nous cassons pas la nénette
Si nous sommes encore internés.
Qu’est-ce ça fout ?
On s’en fout.
Pour combattre, etc.

On a fait un drôl’ de voyage
Grâce aux bons soins des tovaritchs
Qui nous ont foutus dans des cages
Pour nous conduire à Grazievitch.
Ne nous cassons pas la nénette
Si nous sommes encore internés.
Qu’est-ce ça fout ?
On s’en fout.
Pour combattre, etc.

Mais comme on n’est pas des·bourriques,
Pour sûr qu’un jour on s’en tirera !
Grâce à nos amis britanniques,
Vers la Syrie on les mettra.
Ne nous cassons pas la nénette
Si nous sommes encore internés.
Qu’est-ce ça fout ?
On s’en fout.
Pour combattre, etc.

Ceux qui reverront notre France
Si douce et tellement aimée
Diront qu’on a tous eu confiance
En sa glorieuse destinée.
Ils n’se casseront plus la nénette,
Ils pourront vivre en liberté.
Plus d’barbelés !
En liberté !

Refrain

Pour combattre avec de Gaulle,
Souviens-toi, souviens-toi
Qu’il faut s’taper pas mal de tôles,
En veux-tu, en voilà,
De Kaunas à Mitchourine
Au paradis de Staline,
Evadés dans la misère,
Toujours la mine altière.