Le camion opératoire est atteint par une bombe
Par Marcel Pontic, de l’ambulance chirurgicale légère
Je me souviens d’un après-midi, vers 16 heures, dans le camion opératoire, l’équipe du médecin-commandant Durbac, composée du lieutenant-dentiste Béraud, assistant, du sergent-chef Aramon, anesthésiste, et de moi-même, infirmier-panseur.
Le médecin-commandant Durbac opérait un légionnaire blessé au ventre, lorsqu’une des nombreuses attaques des Stukas commença.
Une bombe explosa non loin du camion-opératoire qui ébranla celui-ci. Un éclat traversa la salle d’opération, fort heureusement sans toucher personne, ce qui fit dire au commandant Durbac: « Celle-là n’a pas pété bien loin. » Et, avec un sang-froid que je n’arrive pas à analyser maintenant et malgré les détonations plus ou moins proches des bombes qui n’arrêtaient pas, toute l’équipe continua l’opération avec calme.
Hélas, quelques jours plus tard, le bombardement devint si intense qu’une bombe tomba sur le camion-opératoire qui fut détruit, aucun blessé ne pouvait plus être opéré, une autre dans une tente où se trouvaient une vingtaine de blessés, tous furent tués déchiquetés. Mon camarade Wachtel, qui était de service auprès d’eux, fut décapité.
Dans un silence effrayant, une tombe fut creusée dans la nuit pour ensevelir nos camarades.
A huit heures, le lendemain matin, le général Kœnig vint saluer une dernière fois ces héros, vers qui je m’incline respectueusement.
Je voudrais profiter de l’occasion qui m’est donnée pour rendre un hommage respectueux à ce héros obscur qu’était le commandant Durbac, tué en Tripolitaine en 1943.
Extrait de la Revue de la France Libre, n° 168, juin 1967.