Amitiés de guerre
Et voici qu’on nous demande, à nous, les Volontaires françaises de rappeler en quelques mots les témoignages d’amitié dont nous avons été l’objet durant notre long séjour en Angleterre. C’est impossible, il faudrait pour cela écrire tout un livre, car chaque jour apportait à l’une ou à l’autre d’entre nous un peu de cette bonne chaleur qui naît de l’amitié.
Le corps des Volontaires françaises a toujours été l’enfant gâté de son aînée britannique l’A.T.S. En novembre 1940, Mme Mathieu, fondatrice de notre corps féminin, Ria Hackin et Gioia Burdet, ses premiers officiers, reçurent beaucoup d’aide de la part de Dame Helen Gwynne-Vaughan, alors Director A.T.S. Celle-ci prêta un officier, Gillian Dearmer et deux sous-officiers, Lindsey et Brousson, pour aider à l’organisation de l’unité française.
Et combien de comités, d’organisations qui s’occupaient de nous : « The Friends of the Fighting French Forces », les quatre F., comme on l’appelait, avec Lord Bessborough, Mrs. Carr, le Captain Chaplin. Nous n’avons pas oublié the Hon. Mrs. Crawshay qui a tant fait pour nous ; le British Council et Miss Whitehorn qui nous enchantait par son sens de l’humour quand elle nous rendait visite pour s’informer de nos besoins. Et tous ces clubs qui nous accueillaient en invités. S.A.R. la princesse Marie-Louise, elle-même, m’a ouvert la porte de celui dont elle était la présidente. Et le Simpson Services Club où, grâce à Mr. et Mrs. Simpson et Major Huskisson, nous avons eu l’occasion de rencontrer les héros, les membres des gouvernements aussi bien que de plus humbles artisans de la victoire.
Il y avait la reine qui ne perdait pas une occasion d’adresser quelques mots à nos conductrices attendant auprès de leur voiture. La reine, accompagnée des princesses, qui honoraient de leur présence telle ou telle manifestation organisée au profit de nos œuvres. Il y avait la duchesse de Kent ; la princesse royale, Controller Commandant des A.T.S. ; lady Louis Mountbatten… et puis, il y avait le peuple de Londres. Le 14 juillet 1942 nous a laissé à toutes un souvenir extraordinaire. Avec les éléments de l’armée, de la marine, de l’armée de l’air, de la France combattante, nous avons été passées en revue par le général de Gaulle. Durant le défilé, Français et Françaises ont connu un succès inoubliable. Le peuple anglais d’habitude si calme et pondéré nous acclamait de toutes ses forces. Des phrases prononcées dans un français timide nous atteignaient au passage. Une vieille anglaise s’est même écrié avec délire : « J’ai passé le voyage de noce en France ». Quand le général est rentré dans sa voiture, la foule a rompu les barrages et des milliers de mains se tendaient vers lui.