J’ai lu l’affiche, par Yves-Marie Tanguy
Le 18 juin 1940, je me trouvais à Londres, après avoir traversé la Manche sur le Cherbourgeois n° 3 sur lequel j’étais embarqué comme mécanicien. Ce navire était utilisé pour le remorquage d’un chaland qui contenait de l’essence et il desservait les ports d’Ouistreham, Granville, Saint-Malo.
Nous avions été refoulés de ce dernier port par le commandant de port en raison de l’arrivée des Allemands qui envahissaient toute la côte.
Avec difficulté, étant donné notre faible vitesse, nous avons pu rallier Jersey, puis Pool en Angleterre risquant d’être torpillés par des sous-marins. Ayant dû abandonner le Cherbourgeois comme beaucoup d’autres, nous avons atteint Southampton, puis Londres. Les autorités anglaises nous ont fait choisir, comme l’ensemble des marins qui se trouvaient là, soit rentrer en France sur des chalutiers en bois, donc insensibles aux mines magnétiques, soit continuer la guerre.
Étant donné que j’avais une femme et trois enfants encore jeunes et que les moyens que je possédais ne leur auraient pas permis de vivre jusqu’à la fin de la guerre dont nous ignorions la durée, j’avais opté pour être rapatrié en France avec le reste de l’équipage, mais, ancien de la guerre 1914-1918, je fus frappé par une affiche vue à Londres et qui disait que « si la France a perdu une bataille, elle n’a pas perdu la guerre ». Alors je décidai que mon devoir était de continuer la lutte et je me suis engagé à Londres le lendemain.
Extrait de la Revue de la France Libre, n° 156 bis, juin 1965.