Marie Schnir

Marie Schnir

Marie Schnir

Photo d’identité de Marie Schnir agrafée à sa fiche signalétique, dans son dossier d’homologation FFL (coll. SHD).

Marie, Marcelle, Rachel Schnir naît le 26 mars 1907 dans le 18e arrondissement de Paris. Elle est la fille de Daniel Schnir et de Marie, Sophie Solové. Ayant obtenu une bourse de l’État, elle étudie au lycée de jeunes filles de Dijon, où elle passe le baccalauréat, avant de réussir sa licence d’histoire et le diplôme d’études supérieures d’histoire à Paris. Son mémoire est publié en 1933 aux frais de l’État dans la collection des documents de l’histoire de France.

Ayant passé avec succès l’agrégation d’histoire en 1932, elle occupe un poste de professeur d’histoire à Aix-en-Provence en 1932-1933, puis est mutée à Douai, où elle demeure jusqu’en 1936. La même année, elle obtient le diplôme d’art et d’archéologie à Paris avec la mention « très honorable ».

Grâce à une bourse de l’État, elle effectue un voyage en Grèce en 1933. Une deuxième bourse, décernée par la fondation Lavisse, lui permet également d’effectuer un séjour en Angleterre, en Allemagne et en Scandinavie en 1936.

À la rentrée 1936, elle est nommée directrice du collège de Béthune, avant d’être mutée au lycée de Charleville-Mézières de septembre 1937 à janvier 1940. De janvier à septembre 1940, elle dirige le lycée de jeunes filles de Besançon et le centre militaire hospitalier qui lui est annexé. Le 15 juin 1940, elle assure seule l’évacuation du centre, en l’absence des cadres militaires qui se sont déjà repliés. Enfin, à la rentrée 1940, elle prend, sur sa demande, les fonctions de directrice du lycée de jeunes filles du Havre. Sans doute cette nouvelle affectation n’est-elle pas sans rapport avec le contact qu’elle a noué, à la même époque, avec Frédéric Imianitoff, alias « Frédéric Gellé », chef d’antenne d’un réseau de liaison et d’évasion franco-belge ancêtre du réseau Comète. La ville est alors soumise, comme de nombreux ports français, aux bombardements de la Royal Air Force ; l’établissement, qui est occupé par une formation de 350 pionniers allemands, est lui-même partiellement détruit le 20 novembre 1940.

Page 1 du rapport de Marie Schnir sur « la résistance des instituteurs » conservé dans son dossier d’homologation (coll. SHD).

En parallèle à ses fonctions, la ville du Havre la charge d’organiser les œuvres de secours et d’assistance aux sinistrés. Dans ce cadre, elle parvient à obtenir du carburant et des denrées alimentaires suffisantes pour la distribution de mille repas. De même, elle met en place un vestiaire et des distributions de produits indispensables aux familles.

Relevée de ses fonctions par le Conseil d’État le 26 août 1941, Marie Schnir est arrêtée à Banyuls en août, en tentant de passer en Espagne, mais parvient à s’échapper. Recherchée par les polices allemande et françaises, elle s’évade de France par l’Espagne le 1er septembre 1942, mais est arrêtée à Figueras le 14 et internée dans la prison de la ville, puis transférée le 7 octobre à la prison pour femmes de Gérone. Selon Josep Calvet i Bellera, sa capture a lieu alors qu’elle voyage en train en direction de Barcelone. Libérée le 22 décembre, elle est prise en charge par l’ambassade belge à Madrid, étant titulaire d’un passeport belge. Selon le témoignage postérieur de Frédéric Imianitoff, qui l’a rencontrée à cette époque, elle souffre alors de « troubles circulatoires marqués affectant principalement les membres inférieures » qui lui rendent « la marche difficile et pénible », ainsi que des « symptômes d’asthénie profonde consécutifs aux vicissitudes de sa détention ».

Page 2 du rapport de Marie Schnir sur « la résistance des instituteurs » conservé dans son dossier d’homologation (coll. SHD).

Le 3 mars 1943, elle est dirigée sur Lisbonne, où elle se présente à la délégation de la France Libre, dirigée par Charles Gorlier, et signale connaître « la famille du lieutenant Schumann », animateur de l’émission « Honneur et patrie » sur les ondes de la BBC. Là, elle retrouve Imianitoff, qui a rejoint en décembre 1942 Lisbonne, où il travaille, en qualité de délégué du BCRA, à l’organisation de lignes d’évasion et de communications avec les zones occupées, du service de renseignements et de contre-espionnage au Portugal. Durant ce séjour, on lui confie les fonctions d’attachée à titre civil de la délégation, jusqu’à son départ pour Londres, le 15 mai suivant. À ce titre, elle adresse à Londres un certain nombre de rapports sur son activité en France et ses observations (écrit le 5 mars 1943, envoyé le 8), sur « l’esprit de résistance en France » (envoyé le 10 mars 1943), sur « le recrutement des volontaires de la Libération » (envoyé le 22 mars 1943), sur « la résistance des instituteurs » (envoyé le 1er avril 1943), sur « l’influence française à l’université de Coimbra » (5 avril 1943) ou sur les faiblesses de l’effort culturel français à destination de la population de Porto. Elle rédige également un « Message aux enfants des écoles de France » envoyé le 21 mars 1943 pour être lu à la radio.

Page 3 du rapport de Marie Schnir sur « la résistance des instituteurs » conservé dans son dossier d’homologation (coll. SHD).

En Grande-Bretagne, Marie Schnir intègre le cabinet de René Cassin, commissaire à la Justice et à l’Instruction publique. Dans une lettre du 18 mai 1943, elle évoque sa situation. Le général de Gaulle lui paraît un chef « admirable », et son nouveau patron « un homme charmant ». L’accueil qu’on lui a fait est « inoubliable » : « Comme chacun est bon et indulgent. La souffrance a façonné les esprits. L’exil est une rude école ». Logée « chez une vieille fille distinguée », elle peaufine son anglais et se convertit au thé.

Le 15 septembre 1943, c’est le départ pour Alger. Dans une lettre à Gorlier en date du 25 novembre, ses premières observations sur l’esprit qui règne en Afrique du Nord, quelques mois seulement après la formation du Comité français de la Libération nationale, sont amères : « L’ancien noyau de Londres est écrasé. Il faut beaucoup plus de courage pour se taire et vivre au jour le jour que pour protester. Tout est d’ailleurs inutile. Le climat nord-africain étouffe, canalise tout, amenuise les plus solides ».

Page 4 du rapport de Marie Schnir sur « la résistance des instituteurs » conservé dans son dossier d’homologation (coll. SHD).

Elle occupe les fonctions de chef de service temporaire au commissariat à l’Éducation nationale, au cabinet de Jules Abadie puis de René Capitant, du 1er novembre 1943 au 15 avril 1944, puis au commissariat aux Prisonniers, déportés et réfugiés du 16 avril au 31 décembre 1944.

Le 20 octobre 1943, elle est proposée pour la médaille de la Résistance (n° 60), qui lui est remise par le général de Gaulle.

À la Libération, elle réintègre l’Éducation nationale et occupe des postes de professeur au lycée pour filles de Guéret puis, en 1958, au lycée Hélène Boucher, dans le 20e arrondissement de Paris, avant d’entrer à la Sorbonne comme professeur de civilisation française et à l’Alliance française au début des années 1960.

Ayant obtenu l’attestation FFL n° 4759 en date du 21 novembre 1955, elle se voit décerner, le 2 février 1956, la médaille commémorative des services volontaires dans la France Libre (diplôme n° 35 933).

Engagée dans le mouvement ancien combattant, elle assure la présidence d’honneur de l’association des Évadés de France-Londres-Alger. Elle meurt le 22 novembre 1972 à Paris.

Bibliographie
Josep Calvet i Bellera, « Des de l’Alt Empordà a la llibertat. El pas de refugiats estrangers durant el anys de la segona guerra mundial », Annals de l’Institut d’Estudis Empordanesos, n° 37, 2004, p. 151-185.
Émilienne Eychenne, Les Portes de la liberté : Le franchissement clandestin de la frontière espagnole dans les Pyrénées-Orientales de 1939 à 1945, Toulouse, Privat, 1985, p. 230.
Rosa Sala Rosé, La Penúltima frontera : Fugitivos del nazismo en España (1940-1945), Barcelone, Global Rhythm Press, 2011.
Marie Schnir, « En face de la vie, en pas perdre son temps et le sens des mots, être homme », L’Union des combattants, n° 13, nouvelle série, 1972, p. 1.
« Souvenir de Mademoiselle R. Schnir », L’Union des combattants, n° 16, nouvelle série, 1973, p. 11.
Archives nationales, 382 AP 54, dossier « personnel généralité ».
Service historique de la Défense, château de Vincennes, dossier GR16P540850.
Service historique de la Défense, château de Vincennes, dossier GR28P2/338.

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