Philippe Milon
Breton, homme-clé de la Résistance en Indochine (1940-1945) et savant
Né le 21 janvier 1908, Philippe Milon servit comme officier d’artillerie coloniale en Indochine (1941-1945), après la campagne de France. Il vient de décéder dans sa propriété de Bretagne ce 24 septembre.
Il eut un rôle-clé dans la Résistance clandestine en Indochine occupée par l’armée japonaise, sous le proconsulat de Vichy. Choisi par le capitaine Levain (réseau Maupin Levain, du BSM), il fut envoyé en mission par celui-ci, clandestinement, pour établir une liaison directe avec la France Combattante qui poursuivait la guerre contre l’axe Berlin-Rome-Tokyo. Franchissant la frontière de Chine à Langson le 24 mars 1943, il arriva à Alger en mai. Il y rencontra successivement les généraux Catroux, Giraud et de Gaulle, auxquels il exposa la situation générale et celle de la Résistance clandestine en Indochine, objet de dures représailles parfois inhumaines de la part des autorités de Vichy.
Le général de Gaulle lui donna ses instructions à transmettre aux chefs de la Résistance clandestine, via le capitaine Levain. (C’est ainsi que celui-ci fut amené à « ordonner » à l’ancien Génésuper Mordant de prendre la tête nominale de la Résistance : Dès lors officielle, car les autorités de Vichy s’étaient ralliées au GPR, in extrémis).
Le capitaine Milon a accompli plusieurs missions clandestines de liaison, toujours dangereuses en territoire occupé par un ennemi féroce. L’une se fit par parachutage au retour dans les mines de charbon de Langson, en compagnie du commandant de Langlade, représentant du général de Gaulle auprès de l’amiral Lord Louis Mountbatten, commandant-chef Allié dans le sud-est asiatique. (Le commandant de Langlade venait communiquer au gouverneur général Decoux les directives de la France Combattante… qu’il ne suivit pas, en partie.)
Le capitaine Milon fonda la « Mission V » en Chine, auprès du gouvernement du Kuo Ming Tang : M. Sainteny lui succéda au moment de la capitulation du Japon.
Ce héros de la Résistance, exposé aux représailles des autorités de Vichy et des troupes d’occupation, fut aussi un ornithologue réputé, correspondant du Muséum de Paris. Il possédait une importante collection d’oiseaux rares, «empaillés » par un jeune Tonkinois qu’il avait formé, ainsi que de nombreuses planches de dessins de sa main. Cette précieuse collection a pu être mise à l’abri en Chine, avant le coup de force japonais du 9 mars 1945 en Indochine.
Rentré en Bretagne, ayant pris sa retraite dans sa propriété bretonne, Philippe Milon se consacra à sa passion pour les oiseaux : il en a donné une dernière preuve en faisant disperser ses cendres en mer, autour des Sept Îles, la célèbre réserve ornithologique de Bretagne.
Philippe Milon, résistant d’Indochine dont le rôle fut d’importance, disparaît juste un an après le gouverneur de Langlade avec lequel il accomplit plusieurs missions de la France Libre, et deux ans après le colonel Levain qui sut le choisir pour cette entreprise délicate.
Extrait de la Revue de la France Libre, n° 281, 1er trimestre 1993.