Le régiment de chasse Normandie-Niemen
Dès l’invasion de l’URSS par l’Allemagne, le général de Gaulle envisage d’envoyer des soldats français combattre sur le front de l’Est. Quinze mois plus tard, le groupe de chasse « Normandie » est constitué à Damas, sous les ordres successifs des commandants Pouliquen et Tulasne (à partir du 22 février 1943). En novembre, les 58 premiers pilotes et mécaniciens partent pour l’Union soviétique, qu’ils atteignent après un périple de quinze jours. La première base se trouve à Ivanovo, à 250 km au nord-est de Moscou ; les pilotes français y perçoivent des équipements russes et s’entraînent sur Yak-7 biplaces et Yak-1 monoplaces dans des conditions climatiques très rudes.
Le 22 mars 1943, l’unité s’envole à bord de 14 Yak pour rejoindre sa nouvelle base de Polotniane Zavod, à une centaine de km au sud-ouest de Moscou, non loin du front. Dès le 5 avril, les lieutenants Preziosi et Durand abattent chacun un Focke Wulfe ennemi. Le 13 avril, trois nouvelles victoires s’ajoutent au tableau de chasse de Normandie. Les missions se succèdent et les pilotes français remportent plusieurs victoires. En juillet, le groupe – renforcé de huit nouveaux pilotes amenés par le capitaine Pouyade – est engagé dans la grande bataille de Koursk : il exécute 112 sorties entre le 13 et le 17 juillet et abat 17 avions allemands. Mais, le 16, trois pilotes sont abattus (Littolff, Bernavon, Castellan) et, le lendemain, c’est au tour du commandant Tulasne de disparaître dans un combat pres d’Orel.
Sous les ordres du commandant Pouyade, le groupe, qui compte 15 appareils, prend part à la bataille de Smolensk : en moins d’une semaine (20-25 août), il exécute 116 missions et abat cinq avions ennemis. Au 1er septembre 1943, il totalise 42 victoires homologuées ; le 22, en dix-sept sorties, les Français abattent neuf avions – dont un brillant doublé pour le seul Joseph Risso. Au moment ou il s’apprête à prendre ses quartiers d’hiver à Toula, au sud de Moscou, il enregistrera 72 victoires (novembre 1943), mais il avait perdu 21 de ses hommes.
Le 7 février 1944, le groupe Normandie devient « régiment Normandie » à trois escadrilles : « Rouen » (lieutenant Albert), « Le Havre » (lieutenant Mourier), « Cherbourg » (lieutenant Lefevre). Fort de 51 appareils, il participe à la grande offensive soviétique déclenchée le 22 juin en accomplissant des missions d’escorte de bombardiers et d’avions de reconnaissance et de couverture de troupes au sol. Son comportement exemplaire lors des combats pour le passage du Niemen lui vaudra de recevoir, sur décision personnelle de Staline, le nom de « Niemen », désormais accolé à celui de « Normandie ». A l’automne, il prend part aux combats en Prusse-Orientale ; il reçoit la croix de la Libération qui lui est remise par le général de Gaulle, de passage à Moscou.
Première formation de chasse française, Normandie-Niemen avait remporté au moins 273 victoires homologuées (et 37 probables), obtenues au cours de plus de 5.000 missions et près de 900 combats. Il avait perdu 42 pilotes. Le 9 décembre 1944, le général de Gaulle avait inscrit ces mots sur le journal de marche du régiment : « Sur la terre russe martyrisée comme la terre française et par le même ennemi, le régiment Normandie, mon compagnon, soutient, démontre, accroît la gloire de la France ».