Jean-Annet d’Astier de la Vigerie
Notre camarade Jean Annet d’Astier de la Vigerie nous a quittés le 13 décembre 1976. D’un caractère très entier propre à la famille d’Astier, il n’accepta jamais la défaite de 1940. Il avait préparé Polytechnique et s’était engagé dans l’aviation.
A la capitulation, démobilisé, il entre aux Affaires indigènes. Arrêté pour menées anti-gouvernementales au Maroc, puis en France, il est emprisonné à Nîmes.
Evadé, il entre dans la clandestinité, et travaille au Mouvement de libération, avec Y. Morandat, ainsi qu’en liaison avec Combat et Franc-Tireur. Recherché par la police il doit s’enfuir en Suisse vers la fin 1941. Il revient en France en 1942 et passe en Angleterre où il rallie les Forces Françaises Libres. Il sert au B.C.RA., puis rejoint le 342e Squadron Groupe Lorraine, sous le faux nom de Jean Baralier.
Le 3 octobre 1943 lors de la mission sur la centrale électrique de Chevilly-Larue son avion est abattu aux environs de la forêt de Compiègne. Grièvement blessé, inconscient, il est dégagé de l’appareil en flammes par son radio-mitrailleur, lui-même gravement atteint ; il est fait prisonnier par les Allemands qui l’internent au stalag II A de Neubrandebourg. Là, Jean Annet d’Astier monte un réseau de résistance. Il est secondé en fin 1943 par le lieutenant Simon Stoloff des F.A.F.L., lui aussi abattu, et par Jean Villain, employé de commerce devenu pour les besoins de la cause radiologue et même médecin. Ils contrôlent bientôt cinq stalags dans le nord-est de l’Allemagne, organisant le sabotage dans les usines et dans les commandos et un service de renseignements qui s’emparera entre autres des plans des V2 et même des V3 qui n’ont pas encore vu le jour. Ils mettent sur pied le corps-franc « Bayard » qui participa à la capture de Neubrandebourg.
En avril 1945, il déclenche, lors de la rupture du front de l’Oder par les Russes, les opérations d’insurrection contre l’armée allemande dans toute la région de l’Elbe à l’Oder, de Berlin à la Baltique. En mai, reconnu par les Russes, il est rattaché à l’état-major du maréchal Rokosowsky comme commandant militaire français de cette région. Il organise le rapatriement en France de plus de 120.000 prisonniers de guerre et des déportés du camp de concentration de Ravensbrück.
De retour à Paris en juillet 1945, il est nommé député à l’Assemblée consultative, puis désigné comme adjoint au directeur général de la radiodiffusion française. Il démissionne en janvier 1946 au départ du général de Gaulle.
Il entreprend des tournées d’information en Roumanie, Hongrie, Bulgarie, Tchécoslovaquie. Puis il part pour l’Indochine où il rejoint le groupe Champagne et entre au cabinet de Bao Daï. En 1951 il est nommé directeur de l’Information à Tahiti où il crée et dirige la radiodiffusion à Papeete. Il quitte, sa mission terminée, le secteur public et entre dans différentes affaires privées dans lesquelles il n’a pas conservé d’intérêts.
En 1958, il est chargé de mission auprès de M. Michelet, ministre des Anciens combattants.
Depuis plusieurs années il menait un combat inégal contre la maladie, mais les suites de son internement et ses graves blessures de guerre devaient avoir raison de cet être indomptable et jamais résigné. Après de longues souffrances, il succombait des suites d’une dernière intervention chirurgicale.
A la famille de notre camarade, l’AFL exprime la part qu’elle prend à son chagrin.
Extrait de la Revue de la France Libre, n° 218, janvier-février-mars 1977.