La tragique histoire du Buhara, par le Dr Alain Lefort
Au début de l’année 1941, 15 jeunes de Saint-Malo et de la région, dont une dizaine de pilotes ou élèves-pilotes d’aviation, cherchent à rallier les Forces Françaises Libres en Angleterre.
Ayant acheté un vieux bateau de pêche, le côtre Buhara, ils réussissent à appareiller dans la nuit du 12 au 13 février 1941, de Saint-Cast, sur la baie de La Fresnaye, entre Saint-Malo et le cap Fréhel.
Malheureusement, bientôt, le moteur tombe en panne, il faut écoper pour étaler une voie d’eau, une voile est établie, mais la drisse se rompt.
Au petit matin de ce 13 février 1941, les évadés aperçoivent un patrouilleur : hélas, c’est un Allemand, basé à Cherbourg en recherche de sauvetage d’aviateurs allemands abattus sur la Manche au cours des raids sur l’Angleterre.
Ils sont arrêtés, débarqués à Cherbourg, transférés à la prison de Saint-Lô, jugés en cour martiale en avril 1941, et le verdict est sans pitié : deux sont condamnés à mort et fusillés, les autres aux travaux forcés à perpétuité, sauf le benjamin qui n’avait que 16 ans et n’écopa « que » de sept ans de prison. Les autres furent emprisonnés pendant cinquante-quatre mois à Luttenhausen, près de Düsseldorf, et deux y décédèrent en raison des mauvais traitements qu’ils y subirent.
Évadés de Bretagne pour rallier les Forces Françaises Libres, capturés et bien que n’ayant évidemment pas signé d’acte d’engagement, ils ont été reconnus comme Français Libres et ont été décorés de la médaille de la Résistance.
À Saint-Cast (Côtes-d’Armor), sur la pointe du Sémaphore a été édifié un monument à leur mémoire qui serait une réplique du monument érigé sur la frontière franco-espagnole, rappelant le passage des évadés de France partis pour rejoindre les forces de la France Combattante pendant l’occupation.
À l’occasion du 55e anniversaire de cette évasion, une cérémonie du souvenir aura lieu à Saint-Cast le 18 février 1996, à l’initiative des Français Libres et des médaillés de la Résistance.
Extrait de la Revue de la France Libre, n° 293, 1er trimestre 1996.