Une évasion par voie aérienne parmi tant d’autres

Une évasion par voie aérienne parmi tant d’autres

Une évasion par voie aérienne parmi tant d’autres

Extrait de « Cap sans retour » de Madame Germaine L’Herbier-Montagnon

Équipages F.A.F.L.

Tués le 18 septembre 1940 :
capitaine Ritoux-Lachaud,
sous-lieutenant Rolland,
sergent-chef annamite Leobato de Faria Emile (alias Minyer Dzung).

Tués le 16 décembre 1940 :
capitaine Dodelier,
adjudant-chef Trecan,
sergent-chef Cunibil.

D’Algérie en Égypte
1er juillet 1940

Sur le terrain de Youks-les-Bains, près de Tebessa (Algérie), lors de l’armistice, le 1er groupe de la 6e escadre se trouvait basé.

Fin juin, arriva l’ordre de démonter les moteurs, de vidanger l’essence dans le sable, l’interdiction de voler en avion d’armes ; et les chefs furent avertis que si les hommes « désertaient » pour continuer la lutte aux côtés des Alliés, ils seraient relevés de leur commandement.

Ils étaient cinq qui ne se sentirent pas des âmes de vaincus et préparèrent secrètement leur départ.

evasion_algerieLe 1er juillet, vers 4 h 30 du matin, deux Glenn Martin décollèrent du terrain : le 167 A 3 n° 102, piloté par l’adjudant-chef Trecan, avec le capitaine, Dodelier et l’adjudant Cunibil ; puis le 167 A 3 no 82, piloté par l’adjudant-chef Rolland, accompagné du capitaine Ritoux-Lachaud. Ils mirent le cap vers l’Égypte.

Après quatre heures trente minutes de vol et 2.600 kilomètres parcourus, les deux Glenn se présentèrent au terrain de Marsa-Matrouh, en territoire égyptien. La D.C.A. anglaise, non prévenue, tira sur le premier avion, mais, grâce aux manœuvres habiles de son pilote Rolland, il réussit à se poser sans dommage. Les Anglais, croyant avoir abattu un avion italien, se précipitaient pour faire l’équipage prisonnier, mais celui-ci les accueillit avec le sourire, leur annonçant qu’ils venaient continuer la lutte à leurs côtés, apportant ainsi un témoignage éclatant de fidélité de certains patriotes à l’alliance franco-britannique.

Les cinq aviateurs retrouvèrent, à Héliopolis, le général de Larminat, évadé de Syrie, ainsi que trente aviateurs français, dix avions, dont un de combat, quatre chasseurs, deux Morane 406, deux Potez 63. Les deux Glenn Martin s’ajoutant à ceux-ci formèrent les premières Forces Aériennes Françaises Libres.

Plus tard, en tête de son journal de marche, le capitaine Dodelier écrira ces phrases admirables :

« Le présent cahier mentionne les missions effectuées par les Glenn 82 et 102. Elles partent du 1er juillet 1940, date à laquelle les deux avions se sont envolés d’Algérie vers l’Égypte.

« Leurs équipages ont compris que la France ne pouvait revivre libre sans la victoire de l’Angleterre. Ils pouvaient y contribuer ; leur âme était jeune, comme leurs avions étaient neufs. Ne voulant pas être de ceux qui attendent sans combattre cette victoire et comptent pour la libération de leur pays sur la générosité de l’Alliée abandonnée, ils ont préféré donner leur travail et, s’il le faut, leur sang, pour que cette reconstitution de la patrie soit un acte de justice, non de mansuétude. Ils auront, eux, le droit de le réclamer si c’est nécessaire et le sang des morts parlera mieux que tous les discours.

« À la discipline aveugle, ils ont préféré le chemin de l’honneur, c’est celui de l’intérêt de la France immortelle. L’avenir jugera. »

Le 13 juillet, les deux Glenn se posèrent à Aden, le petit Gibraltar anglais, deux grands rochers entre lesquels s’infiltre la passe du golfe…

Les appareils formèrent la French Flight n° 1 qui fit des missions très dures, très efficaces, jusqu’aux tragiques 8 septembre et 16 décembre, où les Glenn 82 et 102 tombèrent glorieusement du ciel…

Extrait de la Revue de la France Libre, n° 119, juin 1959.