Comment le prince Aly Khan rallia la France Libre
À la demeure mortuaire, boulevard Maurice-Barrès, à Neuilly, nos camarades Girard, Fauquenot et Basset (ce dernier portant le drapeau de l’A.F.L.) représentaient, le 19 mai, l’Association à la levée du corps du prince Aly Khan.
Fauquenot a été, sous le mandat, délégué pour la Syrie centrale où se trouve Sélémyeh, lieu choisi par le prince pour y être finalement inhumé parmi ses sectateurs musulmans ismaïliens. Notre camarade, étant devenu conseiller du gouvernement syrien à Damas quand – dans les jours qui suivirent immédiatement l’armistice de juin 1940 et l’Appel du général de Gaulle – le prince Aly Khan se présenta seul à son domicile, le prince venait de Beyrouth où il était sous-lieutenant à la Légion étrangère dans l’armée du Levant qui, après le général Weygand, avait pour chef le général Mittelhauser, auquel son chef d’état-major – le colonel de Larminat – allait fausser compagnie pour poursuivre la lutte.
Le prince Aly Khan, dont le premier geste avait été de se mettre au service de la France Libre à titre étranger, voulait continuer la guerre dans les rangs alliés sous l’effet d’un réflexe que n’eut – on s’en souvient… – qu’une partie des Français du Levant. Les autres se tâtaient, hésitaient, changeaient d’avis : ce qui devait les laisser, pendant un an, sous la coupe de Vichy.
Certains étaient, d’autre part, demeurés sur place pour – en liaison clandestine avec la France Libre, par Jérusalem et Le Caire – préparer la suite.
Dans la confusion générale, le prince Aly Khan s’était adressé à Beyrouth à des officiers qui n’avaient pas encore pris parti, mais qui le comprirent. Sachant que Fauquenot était de ceux dont la position était prise et que sa charge lui donnait des facilités, ces officiers avaient conseillé au prince d’aller le voir à Damas.
Le passage d’Aly Khan en Palestine fut organisé sur-le-champ, via Kuneitra et Djisr Benat Jacoub.
Cela ne présenta pas de grandes difficultés, à condition de ne pas perdre de temps, grâce au désarroi régnant alors.
Cela ne présenta pas de grandes difficultés, à condition de ne pas perdre de temps, grâce au désarroi régnant alors.
Le prince fut provisoirement incorporé comme «major », par les Britanniques, dans leur armée du Moyen-Orient. Mi-1941, il devait revenir au Levant avec le général Catroux.
Fauquenot ne devait le revoir qu’une semaine avant sa mort, à l’Académie diplomatique internationale, où Aly Khan fit un remarquable exposé sur « la politique extérieure du Pakistan ». À cette occasion, le prince évoqua ce passé que nous venons de rappeler et dit à notre camarade : « Je vous ferai signe à la toute première occasion. » Eut-on pu penser que « cette occasion » arriverait là où nous nous trouvions, le 19 mai, devant la dépouille mortelle d’un ami de qualité, au dévouement aussi éprouvé pour notre pays, auquel nous venions témoigner la reconnaissance des Français Libres.
Extrait de la Revue de la France Libre, n° 125, mai 1960